Juste une ombre

de Karine Giebel
Thriller
Pocket - mai 2013
608 pages - 13.95 $

J'ai découvert avec plaisir les auteurs français montants du monde du polar. Karine Giebel en fait partie : elle a gagné plusieurs fois les prix du polar de Marseille (elle est du Var) et le prix du polar de Cognac et SNCF. Mes incursions dans les lectures en français n'en sont donc que meilleures, puisqu'elle me permettent de retrouver mes racines tout en plongeant avec délice et frisson dans le polar...

4e de couverture

D'abord, c'est une silhouette, un soir, dans la rue... Un face-à-face avec la mort. 
Ensuite, c'est une présence. Le jour : à tous les carrefours. La nuit : à ton chevet. Impossible à saisir, à expliquer, à prouver. 
Bientôt, une obsession. Qui vous ruine ta carrière, te sépare de tes amis, de ton amant. Te rend folle. Et seule. 
Juste une ombre. Qui s'étend sur ta vie et s'en empare à jamais. 
Tu lui appartiens, il est déjà trop tard...

Ce que j'en pense

Voici un cas à part : on déteste autant qu'on a peur pour Cloé. Elle est pédante, prétentieuse, cruelle, arriviste, bref au départ on a envie de se dire "bien fait pour elle". Mais au fur et à mesure on apprend à passer outre la carapace, on découvre son secret, on ressent une sympathie pour ses failles, bref on se laisse embobiner par son charme. Alexandre aussi d'ailleurs et comme on aime Alexandre - flic brisé aux yeux de fou mais au sourire ravageur - on se dit que quelque part, Cloé ne mérite pas cette ombre. Personne ne la mérite en fait, pourtant elle est là, mais personne ne la voit, sauf Cloé. Tu trouveras donc dans ce livre ami lecteur des personnages bien écrits, très réalistes et des émotions qu'on a tous ressenties un jour ou l'autre. 

Quant à l'intrigue, que dire ? Suffisamment puissante pour qu'on ressente l'impuissance. C'est principalement un thriller psychologique et c'est tendu, c'est dense, c'est nerveux. On se dit que ce n'est pas possible, l'ombre va bien finir par faire une erreur, par laisser une empreinte, mais c'est là tout le problème d'une ombre, ça ne laisse pas de trace. Et puis soudain, BAM ! Giebel vous jette à terre. Je me suis dit que ça sentait presque le vécu tellement c'est réaliste, tellement l'histoire est semblable aux faits divers que l'on peut lire parfois. Et les faits divers finissent rarement bien... 

Ce livre se lit un peu comme une pièce de théâtre, comme un huis clos. L'action se déroule principalement dans trois endroits, chez Alexandre, chez Cloé et au travail de Cloé. Résultat, une sorte d'intimité se crée, on entre chez eux comme on entre chez soi, ce qui rend l'ombre encore plus dérangeante avec ses intrusions. Y'a de quoi devenir parano en lisant ce livre ! Par contre, attention, ce livre n'est pas pour tout le monde, il s'agit d'une ombre qui cherche à détruire les femmes, il y a donc quelques scènes difficiles. Je ne veux pas spoiler le livre, mais il est question de viol et comme certaines personnes de mon entourage ne supportent pas de lire ce genre de scène, je préfère te prévenir ami lecteur. 

Bref

Un livre qui se lit en une traite, une tension prenante et réaliste (trop ?), des personnages dont les failles sont très crédible, bref un livre que je recommande chaudement. Je lui donne 4/5. 

Ce que j'ai pensé en refermant le livre : bon sang, elle n'y va pas avec le dos de la cuillère !

Le bonhomme de neige (The Snowman)

de Jo Nesbø
Harry Hole #7
Romans Policiers | Folio Policier
GALLIMARD- août 2012
Collection : folio policier
ISBN : 9782070447732 (2070447731)
592 pages - 15,95 $

Après avoir lu le Léopard, j'ai pris ce tome-ci, car il est très souvent cité comme un des meilleurs de Jo Nesbø et, surtout, j'avais envie de savoir pourquoi Harry Hole était si mal en point et comme cela semblait dû au Bonhomme de neige...

4e de couverture

Oslo, novembre 2004, la première neige tombe sur la ville. Dans le jardin des Becker, un bonhomme de neige fait irruption, comme sorti de nulle part. Le jeune fils remarque qu'il est tourné vers la maison et que ses grands yeux noirs regardent fixement leurs fenêtres. Dans la nuit, Birte, la mère, disparaît, laissant pour seule trace son écharpe rose, retrouvée autour du cou du bonhomme de neige... Dans le même temps, l'inspecteur Harry Hole reçoit une lettre signée «le bonhomme de neige» qui lui annonce d'autres victimes. Plongeant son nez dans les dossiers de la police, Harry met en lumière une vague de disparitions parmi les femmes mariées et mères de famille de Norvège. Toutes n'ont plus donné signe de vie le jour de la première neige... D'une sobriété étonnante, Harry Hole va se retrouver confronté, pour la première fois de sa carrière, à un tueur en série agissant sur le territoire norvégien et qui le conduira jusqu'au gouffre de sa folie...

Ce que j'en pense

C'est un livre où les relations professionnelles et personnelles d'Harry s'entremêlent et se rejoignent, où on apprend à connaître encore mieux les différents personnages, ce qui nous rend plus proches des protagonistes et nous donne l'impression de faire partie de l'équipe. J'ai retrouvé avec plaisir Harry Hole, figure emblématique de Jo Nesbø. Bon, évidemment, il va mieux que dans Le Léopard (qui est la suite du Bonhomme de neige), mais comme je les lis dans le désordre... C'est dans ce livre que j'ai su l'étendue de l'horreur vécue par Harry et pourquoi il va si mal dans la suite. En tout cas, j'ai apprécié d'en découvrir un peu plus sur les relations qu'entretient Harry avec ses collègues qui se moquent régulièrement de sa propension à voir un tueur en série derrière chaque chien écrasé. J'ai appris à connaître Rakel et l'histoire qu'elle partage avec Harry et Oleg qui voue un culte sans faille à Harry. 

Ici, pas d'actions à tout va, pas de courses-poursuites à chaque chapitre, mais une tension qui monte progressivement. On a un sentiment d'échec et un pressentiment d'horreur à venir. Harry doit enquêter sur des meurtres du passé en lien avec les disparitions du présent et cela prend du temps. Pendant ce temps-là, le danger augmente, on sent que quelque chose de grave se prépare, mais le tueur semble très trop malin pour qu'Harry puisse l'arrêter et, effectivement, il est à deux doigts de ne pas y arriver (au sens propre comme au figuré !). L'ambiance est froide à souhait - sans doute parce qu'il est question des premières neiges (l'avoir lu en plein juillet n'aurait peut-être pas eu le même impact !) - et ajoute encore à la tension et l'angoisse. Quant à découvrir le coupable... méfiez-vous des évidences !

La lutte d'Harry pour ne pas boire, les efforts qu'il fait et la colère qu'il ressent tout le temps sont visiblement récurrents dans la série, mais c'est ce qui rend le personnage attachant (oui, les clichés ont la vie dure dans les polars). Cependant, même si on peut lire les livres à part puisque cela ne gêne pas l'histoire en elle-même, il y a plusieurs allusions dans les livres à ce qui se passe avant. Il me semble donc qu'il vaut mieux les lire dans l'ordre, d'autant plus que l'état d'esprit d'Harry est lié avec ce qu'il a vécu et donc ce qui s'est passé dans les opus précédents. 

Petit point négatif lié à la traduction je suppose : à quelques reprises, j'ai trouvé les phrases mal formulées et une ou deux fois le sens même de la phrase ne correspondait pas à ce que le personnage devait dire. Il y a dû y avoir un mélange avec les négations ou affirmations, mais j'ai dû mettre la phrase en sens inversé pour que cela fasse du sens dans l'histoire... Il y a aussi le vouvoiement qui n'est pas très courant en Norvège. Je veux bien croire que les francophones vouvoient et qu'il faut se mettre à leur portée, mais si je lis un roman norvégien, ce n'est pas pour retrouver l'ambiance à la française !

Bref

Deuxième livre que je lis de Jo Nesbø et je suis vendue ! C'est un style bien à lui où l'horreur des crimes, l'angoisse liée à l'enquête et l'ambiance froide vous vaudront des frissons garantis ! Une chose est sûre, vous ne verrez plus les bonhommes de neige de la même façon... 4/5 pour ce tome.

Ce que j'ai pensé en refermant le livre : Pauvre Harry, il morfle vraiment ! 


The Clearing

de Dan Newman

Disponible le 29 Octobre 2013
ISBN: 9781909223523
Format: Large (Trade) Paperback
336 pages - CAN$16.99

J'ai reçu un courriel d'Exhibit A m'informant de la sortie future de ce livre. Le résumé m'a plu, j'ai voulu découvrir cet auteur. Ce livre sera le dernier du défi R.I.P. VIII. 

Résumé

In 1976, four boys walked into a jungle. Only three came back alive.


Haunted by terrifying childhood memories he doesn't fully understand, journalist Nate Mason returns to the Caribbean island of St. Lucia where he grew up.

Back then, as the son of a diplomat, he was part of an elite social circle. But during a weekend of whispered secrets and dares in a decaying jungle mansion staffed by the descendants of slaves, Nate’s innocence was torn apart.

The survivors of that gathering blamed what happened on a myth, an unseen terror from the bush. No one believed them. But now. almost forty years later, is the truth finally about to come out?

Within hours of arriving back on the island, Nate becomes convinced he’s being followed. He soon discovers that his search for answers could cost him his sanity as well as his life, as he realises that some childhood nightmares never go away.

Can childhood nightmares haunt you for the rest of your life? How much do you need to believe in a monster for it to become real? The Clearing is a dark and atmospheric psychological thriller, full of intrigue, terror and superstition, which examines our deepest fears of the unknown. A potent mix of the friendship and bravery of Stand By Me and the betrayals and fear of Angel Heart.

Ce que j'en pense

On suit principalement Nate qui revient plusieurs années plus tard sur l'île où il a vécu une histoire dramatique dans sa jeunesse, pour mettre fin à une série de galères qu'il lie au fameux évènement. On le suit donc, mais à différentes époques de sa vie par une série de retour en arrière à l'époque de sa vie sur l'île, à une période cruciale de sa vie adulte et au présent. Ce qui peut paraître mêlant permet en fait de comprendre la situation actuelle, ainsi que le pourquoi de son retour sur l'île et d'être plus proche de lui. Parce qu'on le découvre jeune pré-ado, plein de joie, d'excitation et de terreur, on apprend à l'apprécier, à s'en faire pour lui, à vouloir le protéger (j'avoue : le fait d'être maman d'une pré-ado du même âge a dû beaucoup jouer dans cet aspect !

On découvre les faits, anciens comme nouveaux, au fur et à mesure de l'histoire, avec l'idée que l'on ne comprend le présent qu’en connaissant le passé et ce prémisse est bon. Il y a une part de surnaturel (on est dans une île !) le vaudou n’est jamais loin, les situations bizarres ne s’expliquent jamais exactement, mais suffisent à créer une situation angoissante pour Nate qui ne les comprend pas, parce qu’il n’est pas natif. On s’imagine donc très bien à sa place, vivant une aventure surréaliste (vous a-t-on déjà jeté une patte de poulet en pleine figure ?), ne pas comprendre, mais se sentir très mal à l’aise. Il y a donc une montée d’un sentiment de malaise, de peur et d’incompréhension très bien menée par l’auteur, qui – et cela se sent – connait assez bien les îles, pour y avoir vécu. 

Il y a quelques longueurs, bien qu'il le rythme ne faiblisse pas. Mais comment donc ? Cela prend beaucoup de temps à Nate pour arriver à son but, certes il lui arrive plein de choses, mais par moment, j'ai eu l'impression que l'auteur aurait pu ne pas inclure certaines mésaventures. Heureusement, l'ambiance du livre, la façon de raconter l'histoire et les allers retours dans le temps font qu'à chaque fois que je commençais à trouver le temps long, cela rebondissait, le rythme accélérait, bref, j'étais réconciliée avec le livre. 

J'avoue que j'ai trouvé un peu superflu le but ultime de Nate sachant qu'il retournait au départ sur l'île pour conjurer son mauvais sort. La peur éprouvée par les enfants suffisait à expliquer leur histoire à l’époque et le désir de retour de Nate était largement explicable par la culpabilité associée à l'évènement qui a eu lieu 25 ans plus tôt. La fin est donc moins bonne que ne le laisse supposer le récit, même si l’auteur réussit à la rendre plus agréable en y ajoutant une dernière touche de mystère.

Un des personnages du livre (si on peut parler de personnage) est l'île en elle-même. Certes, il y a d'autres personnes dans le roman, mais à mon sens, l'île tient le haut du pavé avec Nate. L'auteur a su décrire un endroit aussi paradisiaque qu'effrayant. Une ambiance aussi joyeuse qu'étrange, aussi simple (dans les rapports entre personnes) que soumise à plusieurs coutumes et croyances qui compliquent les choses. On comprend et partage la joie de Nate de revoir certaines places, la nostalgie de son enfance, mais également son angoisse. Il y a deux côtés à la médaille et elle peut se retourner très vite ! 

Bref

Un bon roman à l’atmosphère particulière et agréable. Un personnage auquel on s’attache, une île qui ensorcèle. Je lui donne un 3.5/5. 

Ce que j'ai pensé en refermant le livre : une bonne plongée dans la culture des îles !